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Les géants français du BTP pèsent lourd sur le climat

Grégoire Noble
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[Zepros Bâti] Avec une empreinte cumulée évaluée à plus de 1 500 Mt de CO2/an, un panel de 25 multinationales françaises représente des émissions 3,5 fois supérieures à celles de tout le territoire national. Parmi ces entreprises, les trois majors du BTP ne font pas figure de bons élèves quant à la préoccupation environnementale. En revanche, ce benchmark de la Vigilance Climatique couronne un autre groupe, Schneider Electric, qui survole le classement grâce à sa prise de conscience et à ses engagements de réduction de son propre impact.

La France a la chance de posséder des champions industriels de taille mondiale : Vinci, Bouygues, Eiffage, EDF, Engie ou encore Schneider Electric. Des poids lourds de l’économie mais également des émissions de gaz à effet de serre. Car leurs multiples activités et implantations à la surface du globe en font des contributeurs non négligeables à l’effet de serre. L’association environnementale Notre Affaire à Tous (NAAT) a réalisé une étude sur la prise en compte du risque climatique, sur les trajectoires adoptées (ou seulement envisagées) d’atténuation, et sur la mise en place de plan de vigilance, par 25 des principaux acteurs économiques français. Cet échantillon représente des émissions de 1 500 Mt/an.

Sur ce chiffre, les trois majors du BTP et de la concession ne déclarent « que » 32 Mt CO2, ce qui est peu par rapport à d’autres secteurs de l’économie dont l’Energie. Ainsi, Vinci et Bouygues ne reconnaissent que 17 Mt chacun, tandis qu’Eiffage suit de loin, avec un peu moins de 8 Mt/an. Les auteurs de l’étude notent que ces valeurs semblent sous-estimées par les intéressés et que les émissions sont imparfaitement tracées pour Bouygues et Vinci. Sur l’analyse des dangers du changement climatique, si Eiffage admet y contribuer, les deux autres groupes ne concèdent qu’une responsabilité partielle. Dans tous les cas, l’association souligne « une connaissance insatisfaisante des risques climatiques ». Autre volet, celui de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Cette fois, seul Vinci affiche un objectif clair de -30 % de son intensité carbone en 2020 (par rapport à son niveau de 2009). Ses concurrents se contentent d’étudier la question et ne présentent pas encore de stratégie globale pour maintenir le réchauffement planétaire sous la barre des 2 °C. L’association NAAT déplore des « mesures peu quantifiées [qui] dépendent des choix des produits des clients ». Enfin, sur l’existence d’un plan de vigilance, c’est encore Vinci qui se démarque de ses deux challengers, en étant le seul géant du BTP à intégrer le changement climatique dans les risques. In fine, selon les barèmes de notation de l’étude, les trois groupes se tiennent avec des résultats compris entre 30 et 40/100, soit moins que la moyenne.

Schneider Electric, champion toutes catégories

Du côté des industriels des produits de la construction, on pourra noter l’absence de Saint-Gobain et de LafargeHolcim, pourtant présents dans de multiples pays du monde au travers d’activités fortement émettrices. Cependant, Schneider Electric sauve l’honneur puisque le spécialiste du génie électrique arrive en tête du classement des 25 multinationales, grâce à une moyenne très honorable de 77,5/100. Ce qui explique cette excellence ? Avec des émissions annuelles de 6,5 Mt d’équivalent CO2 (soit un peu moins qu’Eiffage) le groupe admet sa contribution au changement climatique et prévoit de réduire drastiquement son impact : -60 % d’ici à 2050 et neutralité carbone sur les chaînes de sous-traitance. L’entreprise compte s’approvisionner à 100 % en renouvelables à compter de 2030 tout en optimisant ses consommations. Seul bémol noté par NAAT : une absence du climat dans son plan de vigilance. L’association livre toutefois une appréciation très positive : « Identification des risques satisfaisante et mesures intéressantes de lutte contre le changement climatique ».

Les auteurs du rapport soulignent que la loi n° 2017-399 relative au devoir de vigilance impose désormais aux sociétés mères de grands groupes « de prévenir les atteintes graves aux droits humains et à l’environnement ». Les résultats de ce benchmark pourront dont être utilisés par ces entreprises pour « prendre conscience des exigences élevées de la loi ». Elles sont tenues de dévoiler l’intégralité de leurs émissions – directes et indirectes – tout en reconnaissant leur part de responsabilité, d’adopter une stratégie en lien avec l’objectif de 1,5 °C en mettant en place des actions cohérentes et effectives de réduction des GES, et enfin, d’intégrer les informations climatiques aux plans de vigilance. « Si elles ne se conforment pas à ces demandes, les multinationales pourront être attaquées en justice, tout comme Total ». Le pétrolier a en effet été traîné devant les tribunaux pour « inaction climatique » par un collectif de treize villes et cinq ONG. Un coup de semonce pour les autres géants ?

G.N.

Grégoire Noble
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