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Les artisans peuvent "sauver" 2024, selon la Capeb

Grégoire Noble
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Capeb Repon

Malgré un léger repli en 2023 (-0,6 %) et des perspectives encore moins favorables en 2024 (-2 %), Jean-Christophe Repon (président de la Capeb) estime qu’un sursaut est possible… si les pouvoirs publics veulent bien faire appel aux compétences de toutes les TPE/PME pour la rénovation énergétique.

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Comme attendu, l’année 2023 s’est terminée avec un léger repli pour l’artisanat du bâtiment (-0,6 %), plombé par le fort recul du marché neuf (-2,3 % sur l’année) et une « relative résistance en entretien-rénovation » (+/- 0 %) note la Capeb. Les indicateurs sont dans le rouge pour la construction avec beaucoup moins d’autorisations (372 500, soit -25 %) et beaucoup moins de mises en chantier (294 700). La reprise n’est donc pas annoncée pour 2024. Mais il en faudrait plus pour décourager Jean-Christophe Repon. Ce dernier annonce : « Ce n’est pas positif, comme attendu, mais il reste une source d’optimisme, c’est la capacité des TPE/PME à répondre aux enjeux ». Le président de la confédération note que les plus petites entreprises étaient moins exposées à la chute du neuf que les groupes de plus grande taille et que l’année qui s’annonce serait bien celle des artisans et entrepreneurs, et notamment dans le cadre de la politique de rénovation énergétique du parc existant.

Si l’entretien-amélioration à proprement parler stagne, le marché de la performance énergétique reste le dernier moteur encore en état d’entraîner l’activité. Ce segment a terminé l’année avec une progression de +1,8 % par rapport à 2022, et il reste encore dynamique (+1,5 % au 4e trimestre). Malgré l’énorme enveloppe promise à la rénovation – 6 Mrds € en 2024 – la Capeb se montre prudente : « MaPrimeRénov’ remaniée, c’est un risque de perturber un marché, même si les budgets sont plus importants ». La confédération craint en effet que ces énormes moyens ne soient finalement gâchés et non employés… Un paradoxe que souhaite combattre Jean-Christophe Repon : « Le gouvernement et les décideurs [des Pouvoirs publics] doivent prendre conscience de la solution que représentent les TPE/PME pour la performance énergétique. Il faut s’appuyer sur les forces en présence ! ». À savoir les 600 000 entreprises du secteur, dont seulement 10 % sont qualifiées RGE et donc potentiellement éligibles aux aides. « Seulement 61 000 entreprises RGE pour réaliser 6 Mrds € de chantiers, comment vont-elles faire ? », s’interroge le président, qui continue de proposer un « certificat de fin de chantier » pour toutes les entreprises artisanales, afin que les aides puissent être déployées par tous. D’autant que les objectifs sont très élevés : « Il faut passer de 60 000 rénovations ‘globales’ à deux gestes en 2023, à 200 000 rénovations ‘d’ampleur’ à trois gestes ». Il s’agirait donc d’une multiplication par 5 du nombre de gestes à réaliser ! D’où la légitime question sur le nombre d’entreprises qualifiées susceptibles de les mener à bien en 12 mois.

« Qu’ils s’occupent de Flamanville et qu’ils nous laissent nous occuper de rénovation ! », Jean-Christophe Repon (Capeb)

Autre question, celle de la distribution des aides, avec des reste à charge encore très élevés pour les grosses rénovations, de l’ordre de 7 000 à 8 000 €. Des montants impossibles à régler pour des ménages modestes, qui n’auront aucun accès à un crédit bancaire. La Capeb milite pour la mise en place d’un PGE Vert pour l’ensemble des ménages, à la façon de ce qui se fait pour financer l’achat d’un véhicule électrique. La confédération espère dans le même temps une réelle simplification du quotidien de ses entreprises adhérentes. « Et non pas une déréglementation, ni une libéralisation du marché », s’emporte Jean-Christophe Repon, qui s’émeut de voir que l’auto-rénovation – certes encadrée par un artisan (compétent) – pourrait donner droit aux mêmes aides que pour des entreprises RGE. « Ce n’est pas possible ! Comment pousser ensuite les professionnels à suivre des formations, des remises à niveau », poursuit le responsable. Pour lui, l’attractivité des métiers du bâtiment réside justement dans les vraies compétences à acquérir et mettre en œuvre. Il conclut : « L’artisanat et l’entreprenariat tirent la France. Leur voix doit porter ! ». La Capeb contactera donc le nouveau Premier ministre, Gabriel Attal, pour lui formuler les mêmes suggestions qu’à Elisabeth Borne, qui n’avait pas eu le temps de répondre au courrier.

Bilan et perspectives

Les chiffres d’activité pour les TPE/PME du bâtiment s’avèrent relativement homogènes, mais la Capeb note quelques différences. Géographiquement, le recul est plus marqué dans les Hauts-de-France, le Grand-Est et Franche-Comté (il est supérieur à -3 %), que dans la moitié Sud du pays ou dans la région capitale. De même, les différents corps de métiers ne sont pas exposés de la même manière aux aléas qui frappent la construction neuve. Les maçons accusent le coup (-2,5 %), alors que les couvreurs-plombiers-chauffagistes résistent beaucoup mieux (-0,5 %).

Du côté des carnets de commandes, c’est l’effritement. Ils sont passés de 99 jours à la fin de 2022, à 75 jours d’activité programmée fin 2023. Le solde d’opinion plonge donc pour les chefs d’entreprises qui misaient sur le neuf (-24 points), alors qu’il reste positif pour ceux qui évoluent dans le marché de la rénovation (+4). Les conséquences sur l’emploi sont sensibles, avec des effectifs en recul au 3e trimestre de l’année (-1,6 % par rapport à la même période de 2022). Les licenciements et non renouvellements de contrats sont plus nombreux et envisagés dans 8 % des cas (+3 points). De même, les créations d’entreprises se font moins nombreuses (-1 %) avec 23 000 nouvelles entités au 3e trimestre de l’année, alors que le nombre de défaillances qui avait été artificiellement réduit pendant le Covid, explose. Ce dernier dépasse désormais son niveau de 2019 pour s’établir à 3 000 défaillances au 3e trimestre (+26 %).

Les perspectives pour 2024 restent plus que mitigées : la baisse devrait se poursuivre dans le neuf et l’année pourrait se terminer en recul de -2 %. « Mais l’inflation s’est ralentie et les taux d’intérêts – encore trop hauts – n’évoluent plus », note la Capeb.

Grégoire Noble
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